Mise à jour : 18 février 2009
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Un peu d’histoire...

Contrairement à une idée communément admise, les antibiotiques ne sont pas sortis un beau jour du laboratoire d’Alexander Fleming. Bien au contraire, la découverte – fortuite – de la pénicilline s’inscrit dans un ensemble de travaux scientifiques intenses, qui culminent au XXe siècle, et visant à combattre les maladies infectieuses. Auparavant, d’anciennes préparations de pâtes moisies destinées à soigner les plaies infectées étaient connues en Chine et en Grèce. Au XIXe siècle, plusieurs scientifiques (Pasteur, Joubert, Vuillemin) avaient déjà remarqué que certains micro-organismes étaient capables d’en inhiber d’autres ou de combattre certaines maladies. Mais c’est à partir des années 1900, en même temps que le développement de la vaccination, que les scientifiques s’attaquent au problème majeur des maladies infectieuses ; à cette époque, la syphilis, la tuberculose et la typhoïde font des ravages, sans que l’on dispose de traitements efficaces. La microbiologie, la médecine et la chimie organique font d’immenses progrès, ce qui permet d’enchaîner les découvertes scientifiques.

La synthèse chimique

C’est sur le terrain de la syphilis que les premiers résultats décisifs furent enregistrés. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, son traitement reposait sur les sels de mercure et l’iodure de potassium. Paul Ehrlich, un médecin allemand qui travaille alors sur les sels d’arsenic, met au point en 1910 une molécule efficace et mieux tolérée, le Salvarsan, qui devient le traitement antisyphilitique de référence jusqu’à l’avènement de la pénicilline.

Par la suite, Ehrlich s’intéresse également aux propriétés anti-infectieuses de certains colorants. Cette piste est suivie par Gerhard Domagk, en Allemagne, qui démontre en 1935 l’efficacité antibactérienne du Prontosil : c’est le premier sulfamide, une famille de substances ayant des propriétés antibiotiques. Plusieurs milliers de molécules sont alors développées, à la suite des travaux d’Ernest Fourneau à l’Institut Pasteur. Jusqu’aux années 1940, les sulfamides règnent en maîtres sur l’antibiothérapie.

Les substances naturelles

La première découverte en ce domaine est souvent passée sous silence : le biologiste français René Dubos, qui travaille alors aux États-Unis, découvre en 1930 une première substance produite par des bactéries vivant dans le sol, et capable d’inhiber le pneumocoque (une bactérie responsable d’infections respiratoires). Ses travaux sont malheureusement éclipsés par l’arrivée massive des sulfamides. En 1939, il isole la gramicidine, une substance naturelle capable d’inhiber l’ensemble des bactéries Gram positif. Il vient de trouver le premier antibiotique naturel.

On ne retient pourtant le plus souvent que les travaux d’Alexander Fleming, un bactériologiste britannique. En rentrant de vacances, en 1927, il observe qu’une colonie de champignons ( Penicillium notatum ) s’est développée par hasard dans une culture de staphylocoques dont elle a bloqué la croissance. Cette constatation n’est pas totalement nouvelle, mais il n’arrive pas à extraire la substance responsable de cet effet. Il pense de toute façon que seuls les sulfamides ont un avenir...

C’est en 1940 qu’Howard Florey et Ernst Boris Chain, qui ont saisi l’intérêt de la découverte de Fleming, réussissent à isoler la substance responsable, la pénicilline, en très petite quantité : cent milligrammes ! Celle-ci montre une efficacité remarquable sur le pneumocoque chez la souris. Les premiers essais sur l’homme sont concluants, mais les médecins disposent de trop petites quantités de ce nouveau médicament pour que son usage se répande.

La production industrielle

La pénicilline pose un problème : elle est difficile à isoler et à produire. La Grande-Bretagne est en guerre et ne peut fournir un effort de recherche suffisant. Howard Florey se tourne alors vers les États-Unis. Une nouvelle levure est isolée, Penicillium chrysogenum , qui produit deux cent fois plus de pénicilline que la levure de Fleming. La production industrielle est confiée à plusieurs grands laboratoires pharmaceutiques. En 1941, les laboratoires Pfizer résolvent la difficulté d’une production en grande quantité, grâce à leur expérience de la fermentation en cuves, acquise dans la production d’acide citrique. La pénicilline devient alors un médicament essentiel en cette période de guerre, pour soigner les milliers de soldats blessés. Elle fait son entrée massive en Europe à la faveur du débarquement en Normandie, et devient l’antibiotique majeur, rapidement suivie par d’autres antibiotiques découverts après la guerre (terramycine, chloramphénicol, etc.).

Pour leurs travaux sur la pénicilline, Fleming, Florey et Chain ont reçu le prix Nobel de médecine en 1945. L’OMS (Organisation mondiale de la santé) estime que, globalement, les antibiotiques ont accru la durée de vie dans les pays occidentaux de plus de dix ans.

Les effets de la guerre
Le contexte de la seconde guerre mondiale a donné un essor décisif à l’industrie pharmaceutique, jusque-là naissante. Les énormes besoins de la médecine militaire ont stimulé chercheurs et industriels dans de nombreux domaines, dont au premier plan celui des antibiotiques, avec la production industrielle de la pénicilline aux États-Unis, juste avant leur entrée en guerre. D’autres médicaments, comme la Mépacrine destinée à traiter le paludisme, ont également bénéficié d’un développement accéléré dans le contexte du conflit mondial. Après la guerre et le démantèlement du géant allemand de la chimie, IG Farben, l’industrie pharmaceutique a été dominée, et l’est encore, par les entreprises américaines et, dans une moindre mesure, européennes. Leur fortune vient en partie de leur essor dans les années 1940, consolidé par l’ouverture d’un nouveau marché de la santé et du médicament (en tant que spécialité brevetée) qui ne cesse de se développer depuis l’après-guerre.
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